mercredi 27 avril 2011

Qu'un seul être vous manque, et bof...

Il est l'Innomé, le Très-Haut, l'Invisible. Croire en Sa présence est un pari, mais ne pas y croire serait un défi. On le dit Tout-Puissant, même si la réalité de Sa puissance n'est une évidence qu'aux yeux de ceux qui croient en Lui. Il est dit unique, et lui imaginer des pairs serait offensant, à tout le moins pour Ses fidèles. Il n'est accessible qu'à bien peu, mais Il est doté d'intercesseurs qui, en de rares circonstances, laissent transparaître Ses desseins au commun des mortels.

Comme sa femme, par exemple. Ou Pierre Moscovici.

Cela va faire des années, maintenant, que plane sur la scène politique française "le scénario Dominique Strauss-Kahn". Des années que l'homme incarne une épée de Damoclès placée au dessus de la tête de Nicolas Sarkozy. Ce dernier avait cru bon de l'exiler pour en éloigner la menace mais las, le Parti Socialiste s'est arrangé pour que le planning du "machin" des primaires ouvertes soit compatible avec la durée du mandat de "DSK" à la tête du F.M.I., et bisque bisque rage. Il est vrai que de sondage en sondage - et à défaut d'un leadership clair à gauche - Dominique Strauss-Kahn est apparu comme un recours. Seulement voilà, un président en exercice du F.M.I. ne saurait mêler sa voix aux politicailleries quotidiennes de son pays d'origine - un devoir de réserve, qu'on requalifiera volontiers en "devoir de décence". De fait, depuis bientôt cinq ans ou presque, Dominique Strauss-Kahn ne dit ni ne fait rien qui puisse avoir un quelconque rapport avec les enjeux politiques en France. Mieux: sa participation à l'élection primaire du Parti Socialiste reste, à ce jour, une hypothèse. Les sondeurs, cependant, qui quand ils ne savent pas spéculent, l'incluent systématiquement dans leurs enquêtes d'intentions de vote. Dès lors on en parle, même si lui-même ne prononce pas un mot. Dès lors il est présent, même s'il n'est pas là.
Pour l'intéressé, cette virtualité a longtemps été un atout, c'est aujourd'hui un boulet. Seuls quelques "communicants", au nom de la vertu supposée de la "rareté" théorisée par Jacques Pilhan, doivent encore trouver des avantages à cette place "au-dessus de la mêlée". Ne doutons pas qu'il se trouve près de "DSK" quelque Séguéla de rencontre pour se réjouir de cette absence de son client sur la scène politique. A tort: cette vraie-fausse candidature tourne désormais au ridicule.

Car la donne a changé. L'enjeu, désormais, n'est pas que le Parti Socialiste et, partant, la gauche, dispose d'une alternative "crédible" à Nicolas Sarkozy. Si on en croit les sondages - qui, en l'occurrence, sont un bon repère puisque ce sont les enquêtes d'opinion qui ont "fait" Dominique Strauss-Kahn ces dernières années - ils sont désormais plusieurs au P.S. à prétendre à ce titre, tant s'est dégradée l'image du président sortant, et pour cause. L'enjeu, désormais, pour le P.S., c'est d'émerger significativement lors d'un premier tour des présidentielles qui verra une déferlante de candidatures y'à-qu'à-faut-qu'on, et pas seulement celle de Marine Le Pen. Et tout porte à croire que le national-populisme d'une part, la gauche radicale d'autre part feront mieux que gêner les candidats "crédibles" - et pour cause, là encore. Or dans ce contexte, rien ne prouve que "DSK" soit un cheval gagnant. Mieux: pour peu qu'in fine le P.S. se présente aux électeurs sous le visage de Dominique Strauss-Kahn, dans la seconde Mélenchon et Besancenot crieront à l'unisson: "poule!" - par les temps qui courent, être le socialiste préféré du monde des affaires est un handicap. Bref, en l'état, Dominique Strauss-Kahn ferait un excellent candidat de second tour, pourvu qu'il puisse sécher le premier. Il serait donc urgent qu'il se mette à l'ouvrage.

Laurent Joffrin, dans le "Nouvel Obs'", suggérait il y a quelques semaines à "DSK" de démissionner immédiatement de sa présidence du F.M.I. pour signifier à l'électorat, par un acte visible, son engagement dans la course. Sous l'hypothèse qu'il entende se présenter c'est un excellent conseil, que l'intéressé ne semble pas vouloir suivre. Sans doute prête-t-il davantage l'oreille à ces "experts" qui lui suggèrent de continuer à jouer les sphynx, arguant de sa récurrente performance sondagière. Et si justement, elle ne tenait qu'à ça, sa performance dans les sondages: à son absence, et surtout, à son silence? Pour en avoir le coeur net il conviendrait, justement, de mettre fin à l'un et à l'autre. Or tout se passe comme si Dominique Strauss-Kahn souhaitait affronter ce moment de vérité le plus tard possible. C'est sans doute un homme brillant, intelligent mais là, soyons clairs: ce petit jeu de "com" est un jeu de con. Tant pis pour lui.

Car, comme pour l'Autre, la foi peut n'avoir qu'un temps, pour peu qu'on l'aie jamais eue.

Ciao, belli