dimanche 23 novembre 2008

Quand les dirigeants du PS jouent aux cons, ils gagnent

Parti Socialiste Français, 23 Novembre 2008 : une organisation politique d’une inanité pyramidale, où le pathétique le dispute à la bêtise et dont le spectacle fait hésiter entre la colère et le découragement.

Flash-back... Comme des dizaines de milliers d’adhérents du PS je m’apprêtais, après m’être prononcé sur les “motions”, à désigner un(e) premier(ère) secrétaire pour le parti. Un choix cornélique et bordelien, vous pensez bien. Comment choisir? Ils étaient tellement enthousiasmants, nos trois finalistes – Ségolène-l’inspirée, Martine- la-sévère-mais-juste, Benoît-la-nouvelle-têtequ’on aurait aimé les mélanger et obtenir le leader parfait. Apres la motion de synthèse, le premier secrétaire de synthèse, voila qui aurait été véritablement innovant. Oui mais voilà, c’était pas possible, d’autant que ce coup-là, même les textes n’avaient pu être synthétisés, alors…
Il y aurait bien eu l’option pouf-pouf : placer les photos des trois candidats sur une table, les pointer successivement en chantant : « Ce-sera-toi-que-je-choi-si-rai-mais-comme-Jau-rès-et-Blum-ne-le-veulent-pas-ce-ne-se-ra-pas-toi : c’est pas toi ! », laissant au hasard le soin d’en éliminer deux sur les trois. Mais reconnaissons-le, ca n’aurait pas été très sérieux.
J’aurais également pu jouer la « préférence communautaire » : mon choix se serait porté alors sans hésitation sur Benoît Hamon, que plus Breton parmi les trois, tu cherches longtemps. Mais si tous les adhérents avaient fait comme moi, on aurait observé une abstention massive parmi tous les non-Picto-Charentais, non-Chtis et non-Bretons, ce qui fait quand même du monde. Et puis à l’heure de la mondialisation et des « identités plurielles », comme on dit, ç’aurait été un peu réac.
Rien à faire : faute de pouvoir utiliser le hasard ou ma tripe philo-celte, il fallut me résoudre à utiliser ma raison:

. Le PS ne souffre pas d’un manque d’idées – les « contributions » et « motions » des uns et des autres en sont pleines, pour qui prend la peine de les lire – mais d’une absence de « fils rouges », de lignes directrices, à l’instar de la « valeur travail » et du primat de l’individuel sur le collectif dans le dispositif Sarkozyen communément appelé UMP. A la limite, il y aurait davantage trop-plein que déficit, chaque motion prenant soin de présenter un catalogue d’actions a mettre en œuvre quel que soit le sujet, de la politique étrangère a la stratégie d’alliances électorales. Or seule l’émergence d’un leader « clivant », non-synthétique, permettrait de formuler une « vision » qui soit intelligible, à défaut d’être totalement consensuelle au sein du parti voire, à certains égards, réaliste. C’est la nature du leadership qui peut dégager des lignes de force programmatiques, et non l’inverse.
. La question des alliances électorales est à la fois centrale et secondaire. Centrale car l’importance qu’on lui accorde est révélatrice du type de projet qu’on porte. En clair : poser comme préalable que le PS ne saurait s’allier qu’à sa gauche signifie une vision du corps électoral dont la structure aurait été figée une fois pour toutes au début des années 70. Secondaire car il s’agit avant tout de définir un projet. Se demander si telle ou telle formation politique concurrente est susceptible d’y retrouver ses petits à l’heure des ralliements de second tour, c’est perdre son temps. D’autant que rien n’est moins certain, de nos jours, qu’un report de voix.
. La préservation de la pérennité du PS, en tant que système et mode de fonctionnement, ne peut être un but en soi. Ce qui compte, c’est que de cette organisation émerge une force politique en mesure d’influer sur le « cours des choses » : en l’occurrence, une force dont la vocation centrale soit de rebattre les cartes du « deal » passe entre la collectivité et le monde de l’économie au cours des vingt-cinq dernières années, une force qui construise le monde post-Reaganomics en France... et en Europe autant que faire se peut.

Vint le temps d’examiner les candidats en lice :

- Martine Aubry est brillante mais présente deux handicaps : tout d’abord, elle tient dans cette compétition le rôle peu enviable de concentré pachydermien, à savoir de représentante, par défaut, de ce qu’il est convenu d’appeler « les éléphants ». Par Ségolénophobie en effet se sont successivement ralliés à sa candidature Fabius, DSK, Delanoë (donc Hollande et Jospin) puis Lang. A ce titre, et éventuellement à son corps défendant, elle synthétise un casting de losers dont la seule obsession semble être de maintenir un statu quo, où les écuries s’écharpent dans un entre-soi de bon aloi ; par ailleurs par ses positions, ses attitudes, elle représente, à tort ou à raison, un épouvantail à patrons, or pour négocier, il faut être deux.
- Benoît Hamon: Breton et plein d’allant, certes, mais il est le porte-parole, au sein du parti, de ceux qui rêvent encore d’ « union de la gauche », un concept remis a l’ordre du jour par Mitterrand à une époque où le PCF pesait 20% des voix. Or de nos jours, mis à part les Verts (dont le poids électoral est à ce jour plutôt ténu), le moribond PCF et le squelettique PRG, de quoi parle-t-on ? S’il s’agit de rallier les néo-bolcheviks du NPA, non seulement c’est crétin, mais c’est peine perdue : ces gens-là ne veulent pas entendre parler d’une participation ou du soutien à un gouvernement qui ne soit pas léniniste et l’un de leurs objectifs explicites est, comme ils disent, de « plumer la volaille social-démocrate ». Quant a vouloir capter la nébuleuse altermondialiste, t’as qu’à croire, comme on dit en Basse-Bretagne

Bref, j’en étais là et m’apprêtais, par élimination, à voter Ségolène Royal lorsque crotte de bique, je m’aperçus que le vote du premier tour était clos. Qu’à celà ne tienne, me dis-je, me reste le second tour. Je votai donc Ségolène Royal au second tour.

Comme tout le monde, j’ai pu ces jours-ci prendre connaissance des résultats du scrutin, et surtout des conséquences de ces résultats: un désastre, et on n’a pas encore vu le plus beau.

On peut voir les choses de deux façons : on peut se dire que Ségolène Royal, en sortant du « Frigidaire » sa candidature a cristallisé une opposition à sa personne jusque là diffuse, ou bien arguer que la constitution de ce « front-tout-sauf-Ségolène » a créé de toutes pièces un clivage idéologiquement artificiel mais, au final, politiquement réel et, de fait, totalement paralysant.

Dans l’un et l’autre cas, cependant, le constat s’impose : ce ne sont pas des éléphants ou une gazelle que cette organisation a placés au sommet de sa hiérarchie, mais une bande de taupes abruties.

D’un côté, une ex-candidate à la présidentielle qui se croit suffisamment populaire pour faire l’impasse sur la construction d’alliances tactiques avec les leaders en place (Après avoir, durant la campagne présidentielle, fait l’impasse sur ses anti-sèches en matière économique et sociale, décidément c’est une manie). De surcroît, elle se construit sciemment une image d’ « outsider », convaincue que cette « externalité » constituera un atout. Le tout en en faisant des tonnes dans un registre bigot-gnan-gnan propre à exaspérer le plus tolérant des athées.

De l’autre, une brochette de dirigeants, dont la principale occupation consiste à se bouffer le nez, s’allie soudain sur une ligne selon laquelle non, ça va pas être possible, une femme pareille. Et d’inventer des polémiques à deux balles genre « alliance ou non avec le MoDem » (ectoplasme qui n’existe politiquement que lorsqu’on en parle) ou « parti de militants Vs parti de supporters » (comme si, de 1971 à 1988, le Parti Socialiste ne s’était pas inquiété de faire élire François Mitterrand). De part et d’autre une incompatibilité savamment cultivée et surtout, surtout, une incapacité totale à prendre conscience de l’indécence de ces querelles de lutins aux yeux de l’opinion.

Tout bien réfléchi, aucun des acteurs de ce casting minable ne méritait mon vote. Et j’imagine qu’à cette heure je ne suis pas le seul à penser ainsi. Ce vote 50/50 (sous réserve de tripatouillages éventuels) traduit peut-être une indécision, mais aussi très sûrement deux vagues de rejet dont les effets s’annulent.

A ce train, la victoire de Sarkozy en 2012 n’est plus une éventualité, c’est une certitude : alors à vous tous, Ségolène, Martine et les autres, un grand merci et encore bravo.

Ciao, belli.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Salut Riwal,

N'étant pas d'obédience socialiste, je regarde cette querelle de chefs avec curiosité et dépit. La question de fond est comment un parti qui a perdu 3 élections présidentielles à la suite, qui a identifié le problème de fond (unité et opposition) s'emploie à l'auto-torture avec tant de méthode ?
En tant que démocrate, je pense qu'il nous faut une majorité et une opposition solides et pro-actives.
Comme le titre Libé de ce matin (PS: Parti Suicidaire), je me demande comment ce parti peut espérer convaincre la France qu'il est capable de gouverner ce pays ???
Le côté positif, c'est que celui ou celle qui sortira ce parti de la crise aura démontré une vraie capacité de leadership.

A+

Fred

Anonyme a dit…

Bonjour la Suisse,

Vous savez pourquoi ils s'accrochent tellement à leurs fauteuils les éléphants du PS ? La victoire de Mitterand en 81 les fait encore rêver. Un mec grillé depuis l'histoire du faux attentat de l'observatoire, qui a réussi à détruire Rocard, candidat naturel, à rallier Chirac à trahir ses idées pour satisfaire ses ambitions de 1988, ne peut que donner de l'espoir à cette bande de bouffons usés par leur guerre de chefs.
Ce qui est dommage c'est que DSK et Delanoé ont vraiment la carrure pour le poste mais les militants de base n'en veulent pas.
Ma prévision pour l'avenir : la mort du PS ! L'aile gauche va se rallier à Besancenot et l'aile centre gauche au Modem. Avec trois partis on garde le petit Nicolas en 2012, et peut-etre aussi en 2017 vu l'égo du monsieur et la satisfaction de dépasser les 12 ans de Jacquo et les 14 ans de François...
Mais tout ceci n'est que rêve car il parait que 2012 va être une bonne et...
... dernière année ! Amusez-vous à taper 2012 sur Google and enjoy !
Gilles (un obscur ancien collègue de la World Company)