Fillon rame, Copé meuble. Vocation ou malédiction, deux des béquilles de Nicolas Sarkozy tentent ce jour, tant bien que mal, de donner du sens à la dernière foucade du Président: l'organisation d'un "débat" sur la "place de l'islam dans la société française" désormais requalifié en "débat sur la laïcité". Chez le premier c'est un sacerdoce, chez le second l'occasion de se poser en exégète serein mais exigeant d'une ligne présidentielle parfois un peu dure à suivre et donc, in fine, en successeur probable. L'un rame l'autre meuble, donc, car il n'échappe à personne, y compris à droite, que cette envie soudaine, sortie du chapeau élyséen lors du laborieux exercice "Paroles de Français" sur TF1, constitue un tropisme "identitaire" propre à labourer les terres du Front National.
Or depuis la présidentielle de 2007, durant laquelle la recette a fait merveille, les choses ont changé: la politique en matière de sécurité est un fiasco, à tout le moins dans la perception qu'en ont les électeurs sinon dans les faits, le "grand débat" sur l'identité nationale s'est terminé en eau de boudin, la crise et une persistante "politique d'offre" ont laminé le pouvoir d'achat des catégories les plus défavorisées, le tout nourrissant un regain de popularité du Front National qui, last but not least, s'est payé un lifting en se choisissant "fifille" pour leader.
A partir de là, évidemment, la réactivation soudaine d'une thématique propre à légitimer les thèses du F.N. et donc à en accroître le potentiel électoral peut apparaître comme suicidaire. Nombreux, à droite, sont ceux qui commencent à se demander si le président, naguère adulé pour sa clairvoyance, ne commencerait pas, par hasard, à avoir un petit peu de jeu dans la direction. Surgit l'hypothèse, terrifiante pour la majorité, d'un "21 Avril à l'envers" qui verrait s'affronter, au second tour de la présidentielle de 2012, le (la) candidat(e) du P.S. et Marine Le Pen.
L'accusation de faire le jeu du Front National est donc un air largement entonné par la classe politique, par toute la gauche pour en faire un argument polémique, par certains, à droite, pour en pointer les risques électoraux. Les uns et les autres, bien sûr, au nom de "valeurs républicaines", balayant d'un revers outragé le soupçon de préoccupations purement politiciennes. Quoiqu'il en soit, le constat selon lequel Nicolas Sarkozy en fait des wagons pour préempter les thèmes de prédilection du F.N. fait quasiment l'unanimité. Il est vrai que les preuves ne manquent pas. Tout récemment, encore, on relève le tour de passe-passe consistant à affubler le délestage du boulet Alliot-Marie du masque d'un réajustement nécessaire de l'action gouvernementale. Avec, en ligne de mire, l'idée que l'on entend protéger le territoire français et ses habitants des soubresauts incertains de l'outre-méditerranée. Les masses arabes que ne contiennent plus ces garde-chiourme un peu rudes, certes, mais si familiers, forcément ça peut effrayer le boulanger du coin, se dit-on en haut lieu. Tout se passe comme si, à propos de tout et n'importe quoi, il convenait d'aller chatouiller Marine.
Au premier abord, cette fuite en avant Le-Péno-centrée de Sarkozy (par ailleurs aux abois dans les indices de popularité) revient pour le président à se tirer une balle dans le pied. Mais à y regarder de plus près on se dit deux choses:
Or depuis la présidentielle de 2007, durant laquelle la recette a fait merveille, les choses ont changé: la politique en matière de sécurité est un fiasco, à tout le moins dans la perception qu'en ont les électeurs sinon dans les faits, le "grand débat" sur l'identité nationale s'est terminé en eau de boudin, la crise et une persistante "politique d'offre" ont laminé le pouvoir d'achat des catégories les plus défavorisées, le tout nourrissant un regain de popularité du Front National qui, last but not least, s'est payé un lifting en se choisissant "fifille" pour leader.
A partir de là, évidemment, la réactivation soudaine d'une thématique propre à légitimer les thèses du F.N. et donc à en accroître le potentiel électoral peut apparaître comme suicidaire. Nombreux, à droite, sont ceux qui commencent à se demander si le président, naguère adulé pour sa clairvoyance, ne commencerait pas, par hasard, à avoir un petit peu de jeu dans la direction. Surgit l'hypothèse, terrifiante pour la majorité, d'un "21 Avril à l'envers" qui verrait s'affronter, au second tour de la présidentielle de 2012, le (la) candidat(e) du P.S. et Marine Le Pen.
L'accusation de faire le jeu du Front National est donc un air largement entonné par la classe politique, par toute la gauche pour en faire un argument polémique, par certains, à droite, pour en pointer les risques électoraux. Les uns et les autres, bien sûr, au nom de "valeurs républicaines", balayant d'un revers outragé le soupçon de préoccupations purement politiciennes. Quoiqu'il en soit, le constat selon lequel Nicolas Sarkozy en fait des wagons pour préempter les thèmes de prédilection du F.N. fait quasiment l'unanimité. Il est vrai que les preuves ne manquent pas. Tout récemment, encore, on relève le tour de passe-passe consistant à affubler le délestage du boulet Alliot-Marie du masque d'un réajustement nécessaire de l'action gouvernementale. Avec, en ligne de mire, l'idée que l'on entend protéger le territoire français et ses habitants des soubresauts incertains de l'outre-méditerranée. Les masses arabes que ne contiennent plus ces garde-chiourme un peu rudes, certes, mais si familiers, forcément ça peut effrayer le boulanger du coin, se dit-on en haut lieu. Tout se passe comme si, à propos de tout et n'importe quoi, il convenait d'aller chatouiller Marine.
Au premier abord, cette fuite en avant Le-Péno-centrée de Sarkozy (par ailleurs aux abois dans les indices de popularité) revient pour le président à se tirer une balle dans le pied. Mais à y regarder de plus près on se dit deux choses:
- Nicolas Sarkozy est tout sauf un imbécile
- Il tient par-dessus tout à sa ré-élection en 2012
A partir de là, la seule conclusion logique est que "faire le jeu du Front National" est, de la part du président, une volonté délibérée. Nicolas Sarkozy veut refaire le coup du 21 Avril. Mais à l'endroit. Avec lui face à Marine Le Pen au second tour, et l'électorat de gauche de nouveau contraint, dix ans plus tard, d'aller voter à reculons. Ré-élection garantie, donc, même si c'est au prix d'un score moins Zaïrois que les 82% de son prédécesseur - banalisation du "Marinisme". Un petit côté roulette russe mais cette hypothèse qui, paraît-il, circule dans les couloirs de l'assemblée, a été prudemment soulevée par Renaud Dély vendredi dernier sur France Inter. L'éditorialiste soulignait la bonne dose de cynisme qu'une telle stratégie pouvait induire chez le président, tout en sonnant bruyamment le tocsin sur le thème "on joue avec le feu". Certes. On pourrait objecter que François Mitterrand ne fit pas moins preuve de cynisme lorsqu'au milieu des années 80, il agita discrètement le chiffon rouge des "potes", tout en instaurant le scrutin proportionnel aux législatives. Et installa, de facto, le Front National dans le paysage. On objectera, surtout, que Nicolas Sarkozy n'a pas le choix: la montée, aussi haut que possible, de la popularité de Marine Le Pen est une nécessité vitale s'il entend rempiler.
Tout porte à croire, en effet, que le seul thème qui soit a priori objectivement - et légitimement - porteur pour 2012 soit celui des questions économiques et, surtout, sociales. Or sur cette thématique la droite, et, singulièrement, son leader, sont d'ores et déjà dans les choux (chômage persistant, pouvoir d'achat en panne sèche, frustrations multiples au sein de la classe moyenne, notamment des fonctionnaires, colère sourde face à l'insouciance des nantis à la Woerth-Bettencourt). Dès lors il convient d'éviter ce terrain à tout prix. Et se déplacer sur celui d'une "identité", d'une "sécurité" que viendraient mettre en péril des bigots barbus et des jeunes à capuche, les uns encombrant les rues en se prosternant par dizaines vers l'est cinq fois par jour, les autres démolissant les vitrines des magasins qui bordent ces mêmes rues. Réécrire, encore et encore, le code pénal à chaque nouveau faits-divers bien sordide, et fantasmer une impraticable justice "du peuple" (les jurés en correctionnelle) pour mieux souligner le "laxisme" des magistrats professionnels. Etc, etc... L'avantage c'est que, sur le triptyque sécurité-identité-immigration, la gauche sera nécessairement en retrait, soit par souci éthique - éviter les amalgames... et singulièrement le triptyque lui-même - soit parce qu'elle ne s'exprimera pas d'une seule voix. Il sera alors aisé de mettre le P.S. et son (sa) candidat(e) hors-jeu en l'accusant de faiblesse.
Nicolas Sarkozy fait le pari suivant, qui est loin d'être idiot ou irréaliste: la montée du F.N. ne saurait obligatoirement se faire davantage au détriment de sa personne qu'à celui du (de la) candidat(e) du P.S., bien au contraire, et le récent tournant "social" du F.N. ne peut que le conforter dans ce pari. Plutôt que d'éteindre l'incendie, il convient de l'attiser, en se disant que le vent le portera à dévaster les terres du voisin. Entre les deux tours, il sera temps d'adopter une posture "républicaine" et de siffler la fin de la récréation.
Dans cette perspective, la matérialisation - ou pas - de l'ectoplasme D.S.K. sur la scène de la présidentielle n'a strictement aucune importance, même si la probabilité de cette matérialisation n'est pas pour rien dans la frénésie national-populiste qui saisit l'Élysée. Mieux, la présence de D.S.K. n'est pas nécessairement une mauvaise chose dans le contexte de cette stratégie de campagne, et la sortie limite-Pétainiste de l'inénarrable Christian Jacob sur le côté "loin du terroir" du président du F.M.I. n'est sans doute pas fortuite.
L'enjeu n'est pas de savoir si l'hypothèse selon laquelle Nicolas Sarkozy fait sciemment progresser le Front National est juste - c'est une évidence. L'enjeu n'est pas de dénoncer, de pousser des hauts cris et de rivaliser d'éditoriaux brillants sur la "république humaniste en danger" - ça ne servira malheureusement pas à grand-chose. L'enjeu, c'est de ramener l'économique et le social au centre du débat. Pour cela, il faudrait notamment un P.S. un peu moins occupé à se gratter les primaires. C'est pas gagné.
Ciao, belli
L'enjeu n'est pas de savoir si l'hypothèse selon laquelle Nicolas Sarkozy fait sciemment progresser le Front National est juste - c'est une évidence. L'enjeu n'est pas de dénoncer, de pousser des hauts cris et de rivaliser d'éditoriaux brillants sur la "république humaniste en danger" - ça ne servira malheureusement pas à grand-chose. L'enjeu, c'est de ramener l'économique et le social au centre du débat. Pour cela, il faudrait notamment un P.S. un peu moins occupé à se gratter les primaires. C'est pas gagné.
Ciao, belli
3 commentaires:
Heureusement, Gérard Longuet est enfin nommé Ministre de la Défense. Depuis le temps que j'attendais une réponse à mes problèmes...
L'analyse est hardie, bien que crédible (comme tout ce qui est écrit dans ce blog, par ailleurs).
Sauf que le fameux "sondage" publié par je ne sais quel institut docte "es-opinion française", plaçant la Marine en première position des intentions de vote au premier tour de 2012 vient quand même percuter le "pari" sarkozyste. Car, l'hypothèse d'un recourd de droite (qui pèserait sur l'audience du président sortant et saperait d'autant la base électorale nécessaire au 2ème tour) n'est pas exclue. Ni même (on peut rêver), la révélation d'un-e vrai-e candidat-e de gauche rassemblant large et pétant les scores...bref, l'hypothèse d'un 21 Avril à l'endroit me semble assez peu crédible. Par contre, je suis persuadé de 2 éléments :
1/ de fait, la seule voie de la gauche est de creuser la plaie de l'inégalité croissante qui nous ronge, loin du foin médiatique du fameux triptyque sécurité-identité-immigration. Sur ce
L'analyse est hardie, bien que crédible (comme tout ce qui est écrit dans ce blog, par ailleurs).
Sauf que le fameux "sondage" publié par je ne sais quel institut docte "es-opinion française", plaçant la Marine en première position des intentions de vote au premier tour de 2012 vient quand même percuter le "pari" sarkozyste. Car, l'hypothèse d'un recourd de droite (qui pèserait sur l'audience du président sortant et saperait d'autant la base électorale nécessaire au 2ème tour) n'est pas exclue. Ni même (on peut rêver), la révélation d'un-e vrai-e candidat-e de gauche rassemblant large et pétant les scores...bref, l'hypothèse d'un 21 Avril à l'endroit me semble assez peu crédible. Par contre, je suis persuadé de 2 éléments :
1/ de fait, la seule voie de la gauche est de creuser la plaie de l'inégalité croissante qui nous ronge, loin du foin médiatique du fameux triptyque sécurité-identité-immigration. Sur ce
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