Un Breton né à Paris, ayant son foyer en Suisse mais expatrié temporairement au Maroc, qui se mêle de ce qui vous regarde. Sans logique aucune, en toute subjectivité.
dimanche 25 février 2007
Droit de réponse
samedi 24 février 2007
Métaphores animalières
jeudi 22 février 2007
Ségolénisme suspect
jeudi 15 février 2007
Un peu de politique, pour changer
De toute facon, on a appris entre-temps que Johnny allait bientôt pouvoir être belge, ce qui lui permettra ultérieurement de résider à Monaco. C'est bien connu: le plus court chemin pour aller sur la Côte-d'Azur quand on vient de Paris, c'est de passer par Bruges ou Anvers. Comme Monaco est une espèce d'OVNI juridique qu'aucune convention internationale n'affecte, à part la libre circulation des capitaux, l'idée de coincer Johnny-le-Sarkozyste devient irréalisable, à moins d'annexer Monaco.
Exeunt, donc, le projet imbécile et le chanteur opportuniste, à moins que ce ne soit l'inverse .
Le bruit médiatique se focalise ces jours-ci sur le fait que "malgré Villepinte", Ségolène Royal se fait toujours distancer dans "les sondages" (voir http://helvetia-atao.blogspot.com/2007/02/contre-les-sondages-tout-contre.html). Petite précision: les sondages qu'on nous sert ces jours-ci ont tous été réalisés lundi. Et nos amis commentateurs de s'esbaudir en choeur sur le fait que la "stagnation se confirme". Le show de dimanche et ses retombées n'ont pas influencé l'opinion mesurée lundi, c'est un fait. Quatre ou cinq instituts différents restituent un état de l'opinion comparable pour une mesure effectuée le même jour, la belle affaire.
Là-dessus on nous développe la polémique sur le "chiffrage", sur lequel ni l'UMP ni le PS n'arrivent à communiquer un message clair: 30, 35, 38, 39 milliards d'Euros? Comme quoi on a beau avoir fait l'ENA, c'est pas un job facile, la Comptabilité Nationale. Toujours est-il qu'à droite comme à gauche on arrive à des ordres de grandeur comparables, mettons 35 milliards d'Euros. Bon. Mais plutôt que de nous créer de toutes pièces un "débat" autour du fait que machin a dit 38 alors que bidule a dit 35, ne serait-il pas un poil plus édifiant de réfléchir un tantinet sur les mesures qu'on nous propose ici et là?
Moi, par exemple, ça me fatigue d'entendre Nicolas Sarkozy nous expliquer qu'en travaillant plus les français vont gagner plus, alors que des millions de personnes ne demandent que ca, travailler plus, voire travailler tout court, mais qu'il se trouve que pas mal d'employeurs préfèrent offrir des CDD à temps partiel payés à coups de lance-pierres que des CDI à temps plein qui permettent de vivre dignement. Ça me fatigue qu'il nous parle d'"immigration choisie".
- "Bonjour, je m'appelle Diallo, j'ai un emploi et des diplômes, j'aimerais bien trouver un logement abordable à Neuilly
- Ah non, Monsieur, ça va pas être possible, nos 20% de logements sociaux, on a choisi de pas les construire
- Mais pourtant, je suis un immigré choisi
- Justement, vous avez le choix: Saint-Denis, Pantin, Sarcelles, la Goutte-d'Or..."
samedi 10 février 2007
Quand Strauss-Kahn pète un câble
- On nous parle de "contribution citoyenne", j'aimerais qu'on m'explique. Cette contribution, elle se fonde sur mes revenus avant ou après impôts (suisses, en l'occurrence)? J'attire l'attention de mes camarades Dominique, Didier et Francois sur le fait que quand on ne s'appelle ni Johnny Halliday ni Michael Schumacher (qui payent un forfait négocié), en Suisse l'impôt sur le revenu est un des plus élevés d'Europe. Alors dites-moi vite, que je me fasse une idée du prix du "symbole"
- Il semblerait qu'étant français je bénéficie d'avantages que me prodigue la collectivité, sans y contribuer par l'impôt. Je ne sais pas pour les autres, mais "chez nous", en Suisse Romande, les deux consulats ont été ramenés à un seul, pour faire des économies. Par ailleurs, pour que mes enfants puissent avoir un cursus scolaire français, je dois les mettre dans une école privée (un établissement géré par des bonnes soeurs, de surcroît) qui ne touche que des clopinettes de la République. Et, du coup, dépenser des fortunes.
- S'il s'agit de piquer des idées chez les Suisses ou les Américains, faut pas s'arrêter à l'impôt sur les "expats". Empruntons-leur également, tant qu'on y est, leurs systèmes de couverture Santé: entièrement privés, paye ou crève, çà aussi c'est vachement malin, çà évite aux riches bien-portants de payer pour les malades pauvres, chacun pour soi et la loi du marché pour tous
Alors disons-le tout net: cette idée de "contribution citoyenne" me sort par les yeux, et pas seulement parce que je risque de passer personnellement à la caisse.
D'abord, ce truc pue l'opportunisme à plein nez, c'est de la "justice sociale" à deux balles. Evidemment, nous avons beau être relativement nombreux, nous les "expats", que pesons-nous électoralement? Pas grand-chose, en tout cas moins que tous ceux qui pourront être convaincus que tous les francais vivant à l'étranger sont des "Johnny" potentiels ou réels.
Ensuite, ce "machin" est très certainement impraticable. Comment l'administration fiscale, qui peine déjà à recouvrir l'impôt sur le territoire, va-t'elle soudainement se transformer en pompe à fric implacable hors des frontières? La Suisse et les Etats-Unis le font, certes. N'empêche que leurs fonctionnaires, n'en déplaise à mes compatriotes, sont un peu plus efficaces que les nôtres, même si ce n'est pas un exploit.
Enfin, en admettant que cet impôt soit légitime, j'aimerais savoir:
- Combien on espère qu'il rapporte, une fois déduit ce qu'il en coûtera à la collectivité de le percevoir (la France est championne d'Europe en matière de coût de collecte des impôts)
- A quoi exactement cette "contribution citoyenne" est sensée servir, même si je ne me fais pas d'illusion (en France, l'affectation des recettes fiscales est une "black box")
Soyons clairs: je ne suis pas de ceux qui expliquent qu'il est bien normal qu'on quitte le territoire français parce qu'ailleurs on y est moins "contraint", que la France souffre de "rigidités", et toute cette sorte de choses. Et je me contrefous que les Mulliez échappent au fisc et, du coup, ne financent pas les jolies routes nationales qui desservent leurs hypermarchés. J'attache davantage d'importance à la manière dont ils traitent leurs salariés, leurs fournisseurs, et l'esthétique des abords de nos villes. Là, y aurait des trucs à dire et à faire. Mais j'entends n'être pris ni pour un con, ni pour un profiteur parce que les hasards de la vie professionnelle m'ont amené à quitter la France.
Malgré celà, au risque de m'en prendre plein la tronche, je continuerai à dire à mes copains de droite que je voterai Ségolène Royal. Parce qu'au delà de mes convictions, qui m'imposent ce choix, je suis persuadé d'un truc: le jour ou ce dossier vient sur la table, on peut compter sur les fonctionnaires de l'administration des Finances - sans compter ceux des Affaires Etrangères - pour expliquer que oui, bon, d'accord, mais faudrait plus de moyens, plus d'effectifs, et des salaires plus élevés, faute de quoi çà va pas être possible. On parie?
Allez, salut.
jeudi 8 février 2007
Contre les sondages, tout contre
Notons au passage que ce faisant ils oublient, volontairement ou non, que leur "décodage" fait lui-même partie du spectacle, voire en constitue l'essence même. Illustration: l'une des tartes à la crème du moment consiste à rappeler que Nicolas Sarkozy "communique bien", qu'il "maîtrise les médias". Il parle clair et fort, soit. Et ce d'autant mieux qu'on évite les sujets qui pourraient le fâcher, le pauvre chat, comme les chiffres de la délinquance, ses engagements sur le capital de GDF, etc... Bref, ce type sait très bien répondre aux questions dont il apprécie qu'elles lui soient posées. Et, surprise, on les lui pose. Quand on ne se contente pas tout simplement de lui tendre un micro. Du coup, ce qui n'est que le résultat d'une connivence bien organisée devient un fait politique ("il passe bien") relaté en tant que tel.
Quoiqu'il en soit, feinte ou réelle, légitime ou non, il y aura dans le commentaire, l'analyse du discours et des actes des politiques, une mise à distance raisonnable du sujet.
En revanche, cette distance est nulle dès lors que sont évoqués les résultats des sondages.
Ah, les sondages!
De quoi s'agit-il, en fait? Toutes les semaines, en ce moment, des sociétés spécialisées interrogent de 800 à 1000 personnes âgées de 18 ans et plus (en âge de voter), sélectionnées afin que dans leur ensemble elles reflètent, proportionnellement, l'ensemble du corps électoral: ce qu'il faut d'hommes, de femmes, de jeunes, de vieux, de fauchés, de pétés de thune etc... selon des quotas précis croisés entre eux, en prenant pour référence le dernier recensement disponible de l'INSEE. Par téléphone, via internet ou en face-à-face, on demande à ces gens, donc, pour qui ils voteraient "si l'élection avait lieu dimanche prochain". Puis le plus souvent, on leur demande ensuite ce que serait leur choix en cas de deuxième tour X contre Y, ou X contre Z, Z contre W, etc... Après, on compte combien de personnes ont répondu quoi, on divise par le total, et çà donne un pourcentage. Jusque là, tout va bien.
Ensuite, on va creuser un peu: on va croiser ces réponses avec les caractéristiques des individus: homme, femme, etc... mais aussi avec les réponses à d'autres questions: "De quel parti vous sentez-vous le plus proche?" et, plus croquignolet, "Pour qui avez-vous voté au premier tour de la présidentielle / des législatives de 2002?". Et c'est là qu'on commence à rigoler. Parce qu'ici interviennent ce qu'on appelle les "redressements".
Redresser, c'est quoi? C'est, d'une part, transformer le boulot qu'on a fait en boulot qu'on aurait dû faire. Exemple: d'après mes quotas, j'aurais dû interroger 27 agriculteurs âgés de 45 à 55 ans. Manque de bol, les enquêteurs n'ont pu en trouver que 18 acceptant de répondre à mes questions, ce coup-là. Qu'à celà ne tienne: je multiplie leurs réponses par 1,5, et hop, tout va bien. A priori, si ce genre de tour de passe-passe n'est opéré qu'à la marge, c'est au final une démarche plutôt saine (on va pas faire toute une histoire pour neuf malheureux bouseux, quand même). Mais redresser, d'autre part, c'est aussi "corriger" les réponses. Je m'explique: imaginons que 12% des personnes interrogées déclarent aujourd'hui avoir voté Jean-Marie Le Pen au premier tour de 2002. Tout le monde sait qu'il a fait un peu plus de 17%. Dès lors, amnésie ou refoulement, on constate que le vote Le Pen est "sous-déclaré". On procède alors à une "correction" des intentions de vote pour 2007. Dans ce cas précis, on multipliera les intentions déclarées par 1,41. Et on procédera de même, à la hausse ou à la baisse, avec tous les candidats sur lesquels on constate des écarts entre le souvenir et la réalité du passé, présidentielles ou législatives selon les cas. Çà ne marche évidemment qu'avec ceux pour lesquels il y a un historique ou un parti longuement établi. Pour José Bové, c'est plié: on peut s'attendre à de fortes variations dans les intentions de vote, vu qu'il n'y a pas moyen de les "corriger".
La nature et l'ampleur de ces redressements, bien sûr, varient d'une vague d'enquête et d'un institut de sondage à l'autre. Et relèvent d'une "cuisine interne" que lesdits instituts se gardent bien de rendre publique, même sous la torture. Et dont ils ne s'échangeront pas les recettes, concurrence oblige.
Pour compléter le tableau, signalons que toute mesure effectuée auprès d'un échantillon, aussi "représentatif" soit il, est sujette à incertitude. Toute donnée issue d'un sondage est "vraie" à l'intérieur d'une fourchette probable. Pour faire simple: 11%, dans certains cas, c'est peut-être 10, 11 ou 12%, on n'en est pas sûr. Ce dont on est sûr c'est que c'est plus que 9 ou moins que 13.
Dès lors, sans hurler à la manipulation ou au complot - après tout, l'étude de l'opinion est une science humaine, et il y a une rationalité derrière tout ça - l'attitude la plus raisonnable à adopter face à un sondage politique consiste à le traiter comme un reflet plus ou moins fidèle de la réalité de l'opinion, pour autant qu'une "intention de vote si l'élection avait lieu dimanche prochain" (en vrai elle a lieu bien plus tard, on dit, c'est pour d'la fausse) puisse être considérée comme une "opinion". Disons qu'un sondage enregistre - en acceptant la légitimité des redressements de toute sorte, c'est dur à avaler, des fois - un ensemble de préférences probables à un instant t, parmi une population qui, elle-même, est un reflet fidèle de l'ensemble du corps électoral. Ni plus, ni moins.
Face aux "tendances" (machin monte, trucmuche baisse) ou aux classements (oulala, trucmuche est derrière machin chez les agriculteurs) , la moindre des précautions est de vérifier qu'on a affaire à un vrai mouvement ou une vraie hiérarchie, c'est-à-dire au delà de la zone d'incertitude naturelle.
Tout cela, les journalistes et commentateurs politiques le savent. Sinon, le mieux qu'ils aient à faire est de changer de métier. Dès lors, compte tenu de l'enjeu - il s'agit, après tout d'une élection dont le résultat affecte la vie du pays pour les cinq ans à venir - on pourrait s'attendre de leur part à un certain recul par rapport aux résultats des sondages d'opinion. Bien sûr, on lira ou entendra ici et là :"On sait bien ce que valent les sondages...", ou "ce n'est qu'un sondage..." mais ce ne seront là que précautions oratoires, voire raclements de gorge qui précèdent le discours. Parce que dans la foulée on ajoutera "... il n'empêche que machin a perdu un point par rapport à la semaine dernière/au mois dernier".
A partir de là, on commentera cette "baisse":
- en passant en revue les divers "événements" de la semaine à savoir, dans la plupart des cas, les "petites phrases" prononcées par machin ou ses concurrents (sous la pression amicale des journalistes, mais on s'abstiendra de le préciser)
- en développant un ensemble de considérations subjectives sur la personnalité, le parcours, les motivations de machin
Le tout n'ayant généralement qu'un rapport très lointain avec ce que disent les chiffres, pour autant qu'ils disent quelque chose.
Le même commentateur pourra par ailleurs un peu plus tard, dans un éditorial, philosopher sur la vanité des sondages et l'aveuglement qu'il entraîne chez certains politiques "qui ont les yeux rivés sur leur cote de popularité". Alors que les journalistes, eux, bien sûr, savent bien qu'il y a des choses plus importantes.
Un bon journaliste ou commentateur politique se doit d'être contre les sondages. Tout contre. Parce qu'à défaut de fournir une information nouvelle ou fiable, ils constituent des "faits" qui permettent de démarrer une histoire, du genre "la campagne de Ségolène Royal souffre d'un manque de lisibilité" ou "Bayrou, quand l'obstination paie". Ou de la conclure: "gnagnagna, les francais ne s'y trompent pas, puisque machin perd un point par rapport à la semaine dernière". Ca fait plus sérieux, en même temps ça sécurise la dimension "people/course de chevaux" de l'analyse politique. Immense avantage: ça évite de se coltiner des tâches pénibles comme lire un programme, le confronter à ce qu'on a compris des problèmes à résoudre, et interroger le candidat en conséquence.
Bref, les sondages, c'est techniquement un peu compliqué. Mais si on l'oublie, ça rend la vie des journalistes plus facile, et arrête de nous emmerder avec ton débat démocratique.
A bientôt
vendredi 2 février 2007
Bayrou, le Centre adroit
Réalité ou "bruit", comme disent les statisticiens, il faut dire que moi aussi je le "sens" dans l'opinion, le Bayrou, en ce moment. Il a pour lui cette espèce de vertu que constitue la constance poussée jusqu'à l'obstination, en ces temps ou les politiques ont la réputation de changer d'opinion tous les trimestres. Une constance qui consiste à marteler imperturbablement un message articulé autour du triptyque:
- "Je veux rassembler les talents d'où qu'ils viennent", le côté centriste
- "Ce qui est important, c'est de régler le problème de la dette/de l'éducation", genre: on n'est pas là pour rigoler, moi au moins j'annonce la couleur
- "Je suis une alternative crédible au duel Ségo-Sarko qu'on cherche à vous imposer", la "soft rebel touch", ou le frisson raisonnable
Le tout pimenté de charges contre les médias et les "puissances de l'argent", le genre de truc qui crée des aspérités dans le message, comme disent les publicitaires. En effet, ce type vient d'un parti classé à droite, a participé à des gouvernements de droite, et revendique l'héritage de Giscard d'Estaing. Or la droite parlementaire en France a une solide tradition de connivence avec le grand patronat, à l'exception peut-être de De Gaulle. Du coup, ses coups de gueule savamment distillés contre les milieux économiques et leur influence lui permettent de se démarquer de Sarkozy, dont un frère préside la Fédération du Textile au MEDEF. Et, du coup, de se "créer un espace", sachant qu'il est entendu pour tout le monde qu'il n'est pas à gauche. Le recentrage, ça s'appelle.
Enfin - c'est davantage de l'ordre du packaging, mais ça compte - il cultive une iconographie de sa personne le représentant en "pas riche-riche, mais paysan aisé", bottes "Aigle" dans la terre Béarnaise, pantalon de velours côtelé et veste "Barbour" un peu usée jetée négligemment sur les épaules, sur fond de campagne embrumée au petit matin. On a beau dire, un poil de ruralité mais pas trop, ca vous donne un petit côté authentique: ça plaît inconsciemment, en France, même en 2007.
Dans un paysage politique pollué par les communicants de tout poil (journalistes inclus) qui cherchent à vous faire prendre des affairistes pour des philanthropes et des bolcheviks pour des humanistes, ou l'affrontement préprogrammé PS/UMP finit par lasser après six alternances, ce cocktail s'avère être payant dans l'opinion. D'autant qu'il faut bien l'admettre, ce Monsieur n'a pas seulement l'air sincère: il l'est, à n'en pas douter. A cela s'ajoute la sympathie que suscite un type que beaucoup de ses amis ont trahi (remarquez, perdre l'amitié de Philippe Douste-Blazy, on doit quand même vite s'en remettre).
Il y a quand même trois choses qui coincent, à mes yeux, chez Bayrou.
- La première, c'est le centrisme, justement. En admettant qu'il se fasse élire président et que, comme promis, il forme une "dream team" avec ce qui se fait de plus compétent, de plus honnête à droite et à gauche. (Par exemple: Jean-Luc Mélenchon à l'Economie et Christine Boutin à l'Education Nationale. Mais non, je déconne). En admettant que, du coup, il réduise au silence le "faux débat PS/UMP", comme il dit. Et sous l'hypothèse, plutôt vraisemblable, que la situation économique et sociale et l'idée que s'en fait l'opinion ne s'améliorent pas du jour au lendemain, qui retrouve-t'on, dans l'opposition, et donc comme alternative? Le Pen. Plus, bien sûr, la "gauche de la gauche", dont on connaît les capacités à s'organiser, à faire des propositions intelligentes, et à séduire les électeurs, surtout.
- La deuxième, c'est qu'aussi sincère qu'il soit, le Bayrou, dans sa volonté de se situer à égale distance du PS et de l'UMP et de "casser le système", on peut douter que les élus - et les électeurs traditionnels - de son parti soient vraiment derrière lui de ce point de vue. L'UDF, on aura du mal à m'ôter de l'idée que c'est de droite. Mais je le jure: si, à l'heure des législatives, on compte autant de désistements réciproques UDF-PS qu'UDF-UMP, je retire ce que j'ai dit. En attendant, lorsqu'on demande à Bayrou pour qui il appellerait à voter dans l'hypothèse d'un 2ème tour Royal-Sarkozy, il répond: "Je ferai tout pour qu'on n'en arrive pas là", fermez le ban, question suivante. OK, mais si malgré tous tes efforts on en arrive là quand même, hein, dis, imaginons, on ne sait jamais, des fois? Une vraie réponse de centriste, ça serait: "J'examinerais leurs propositions respectives, et je choisirais de soutenir celui ou celle qui porte les idées qui me paraissent le plus justes pour la France". Oui mais voilà: ça laisserait entendre aux électeurs UDF qu'il y a du bon à prendre au PS, et que donc ça fait des années qu'on les prend pour des cons, à les faire jouer les supplétifs pour les gaullistes. Moi, je serais UDF, j'aimerais pas.
- La troisième, c'est le côté catho du bonhomme. En ces temps ou les bigots de toute espèce redressent la tête, je n'aime pas trop l'idée de mettre à la tête d'un État qui se veut - et se doit d'être - neutre et vigilant face aux religions, quelqu'un qui affiche aussi ouvertement ses croyances. N'oublions pas que ce Monsieur, lorsqu'il était à l'Education Nationale a voulu réformer la Loi Falloux, et permettre aux collectivités locales de financer tout à leur aise les établissements scolaires privés (cathos, dans leur grande majorité), au détriment des établissements publics. Moi, j'aimerais bien que les journalistes le cuisinent un peu plus sur des trucs comme l'avortement, la culture des cellules-souche, et la part que peut prendre l'enseignement confessionnel en France. Juste pour voir, comme ça.
Bref: je veux bien admettre qu'il y ait des raisons objectives - et peut-être durables - à ce que l'hypothèse Bayrou devienne de plus en plus crédible. Mais il faut appeler un chat un chat, et un berger pyrénéen un chien sympa dont la raison d'être consiste à s'occuper de moutons. Bayrou, même éventuellement contre sa volonté, c'est la droite, basta. Il n'y a pas de mal à ça, mais qu'on arrête de nous parler de troisième voie.
"Le Centre, mon cul", aurais-je tendance à conclure, mais ça détonnerait, au milieu de ces textes plein d'élégance. Quoique.
Allez, à la prochaine.
jeudi 1 février 2007
Numéro 5, le parfum de la France Invisible
Venons-en au fait: José Bové se présente à l'élection présidentielle. Et il déclare: "Je suis le candidat de la France invisible". Pour ce qui me concerne, ca fait du monde: bien sûr je connais pas mal d'électeurs français (certains de vue, seulement, remarquez), mais quand je compare à tous ceux que je n'ai jamais vus! Là c'est sûr, c'est la victoire dès le premier tour, recta. Évidemment, tout le monde n'a pas mon point de vue...
Ah, il en aura fallu , du temps, avant que n'émerge enfin cette candidature que toute la Gauche de la Gauche attendait. Cette figure majeure qui va cristalliser les espoirs de l'innombrable foule anti-libérale, alter-mondialiste, noniste, écologiste, Le-Monde-Diplomatiste. Cohorte dont il faudra évidemment soustraire ceux dont l'espoir s'est déjà cristallisé sur Arlette Laguiller. Soustraire aussi ceux qui sont plutôt motivés par Olivier Besancenot. Sans oublier ni ceux dont les rêves sont portés par la candidature de Marie-George Buffet, ni les Verts inconditionnels de Dominique Voynet. Enfin déduire, bien sûr, les salopards, les traîtres, ceux qui voteront pour la Gauche bourgeoise, sociale-libérale, qu'on finira bien un jour par identifier et par pendre, mais bon, pour l'instant c'est pas possible. Restent donc tous les autres, difficiles à dénombrer à l'heure ou j'écris ces lignes. Auxquels s'ajouteront des sympathisants d'autres mouvances, que l'homme du Larzac ne manquera pas de rallier. Solde net = la France invisible.
Évidemment, il reste le détail des 500 signatures à obtenir. C'est ça le problème avec la Démocratie Bourgeoise: des règles tatillonnes, le droit, la loi des grands nombres... Par ailleurs, une légère contradiction à gérer: comment concilier le mépris de la démocratie représentative - qui va de pair avec la valorisation de l"initiative citoyenne" et de la "société civile"- avec l'idée de s'y soumettre par le biais d'une candidature? La remarque est encore plus vraie, notez, pour les authentiques léninistes que sont Arlette et Olivier. La réponse est simple: les élections, c'est comme un sondage, mais en vrai. Plutôt que d'évoquer des pourcentages, on parle des "centaines de milliers d'électeurs qui ont dit non". Et on compare avec les copains: "C'est moi qu'en ai le plus, tralala, c'est moi la-Gauche-de-la-Gauche, et bisque-bisque rage" -"M'en fous, moi j'en ai plus que toi chez les ouvriers, d'abord, c'est ca qui compte"- etc... Ça occupe les "collectifs" jusqu'à l'élection suivante entre deux manifs, c'est toujours ça de pris.
José Bové, cinquième candidat unique de la Gauche-de-la-Gauche, lui, a trouvé un truc imparable par rapport aux quatre autres, et c'est en cela que sa candidature constitue un événement: le coup de la France invisible. S'il fait un bon score, c'est-à-dire supérieur à celui de ses concurrents, il pourra dire: "Grâce à moi, on les voit". S'il fait un score moyen ou faible il dira: "Évidemment, on peut pas les voir, ils se cachent, ils ne votent pas. Sinon c'aurait été pour moi, vous pensez bien". Reconnaissez que c'est futé. Rien que pour ça, il mérite de se présenter. Amis élus, un bon geste, signez pour lui. Visiblement.
A bientôt.